Parvissima : guerre totale maintenant

Nous sommes en guerre.
Sans doute depuis 2017 contre de nouveaux ennemis déclarés, sans doute depuis 2015 plus qu’avant, sans doute depuis 2013 avec une nouvelle intensité en tant que chrétiens, sans doute depuis le gouvernement Chirac contre nos propres dirigeants, sans doute depuis De Gaulle… depuis 1789… Là n’est pas la question.

Ce qui m’importe ici est le combat quotidien qui incombe a chacun. Chacun est responsable de son temps, nul n’est innocent des dérives de son siècle, chacun est armé donc responsable. Nous avons tous équipage et mission, même si nous nous aveuglons à ce sujet : nous avons tous un ou plusieurs talents (jamais « trop », la distribution est juste et à notre mesure, il ne faut pas la craindre mais lui faire confiance et l’honorer) et l’intuition de la mission qui en découle. Nos armes sont le dessin, l’éloquence et le charisme, la persuasion, la douceur et le réconfort, la musique, l’écriture, les relations et le réseau, l’artisanat, l’enseignement, la transmission, la connaissance des plantes ou des matières, l’esprit d’entreprise, la maîtrise de la Machine et de ses codes, la maîtrise de la chair, la prière… Nos missions sont politiques, esthétiques et spirituelles (ce qui, bien compris, ne fait qu’un), chacun en a l’intuition et le protocole : faire de son mieux, de toutes ses forces, chaque jour, à chaque instant, et transmettre.
Faire _ diffuser _ enseigner.

Longtemps je fus moi-même aveuglée : je demandais vainement un plan que j’avais, comme chacun, en moi, j’oubliais l’évidence de la première Promesse « faire de son mieux », je reculais devant un horizon dont l’étendue m’était terrible, devant des possibles que par manque de foi je pensais démesurés. Si du temps fut perdu, peu importe : regarder en arrière est vain et mortifère, qu’au moins l’expérience serve.

Nous avons aussi tous un ennemi, l’Ennemi, qui prend les formes multiples de ce que nous appelons nos « démons » : notre peur, notre inertie, notre paresse, nos addictions. On pourra l’appeler le Néant, l’Homme Noir, ceux qui envisagent leur combat dans une perspective politique lui donneront le nom de l’esprit du temps qu’ils abominent, il sera l’Aphasie des poètes, la mollesse des combattants, le Diable des orants.
Lui ne connaît nulle relâche, il verse son poison, son opium, dans chacune de nos failles, il entre par les pixels, par le divertissement, par les chicaneries… Nous le savons fort bien la plupart du temps. Nous le reconnaissons, nous savons notre abdication à chaque heure passée dans de vaines querelles virtuelles, devant une série idiote, à vasouiller, à repousser, à procrastiner, à s’évader.

Rappelons-nous le plus souvent possible que la guerre est totale ici et maintenant, comme dans ces fictions cauchemardesques où on doit lutter contre des boucles d’amnésie : par des post-its, des posters, par des sonneries militaires programmées sur nos téléphones pour nous rappeler sur le front, par un bracelet ou une bague, même par un cilice s’il n’y a que ça pour affermir la vigilance (je n’ai jamais essayé, mais si je le fais un jour je vous en dirai des nouvelles), commençons nos journées par un appel aux armes nôtres (ne serait-ce qu’en les nommant ou les contemplant) et une douche glacée. Jeu de rôle ridicule craindra-t-on, mais toute la stratégie de l’Ennemi est de nous faire nier, oublier cette guerre, et de nous la faire perdre pour ne l’avoir menée.

Donning the armour, par Doomster, 2007

2 commentaires

  1. On peut proclamer avec emphase « Je me déclare en état de guerre totale » comme Fritz Zorn, c’est quand même le cancer qui gagne.
    Jolie énumération d’armes plus inefficaces les unes que les autres. L’estimable et sympathique docteur Fouché, colibri d’élite, approuverait.
    L’utilité de rappels, quand on se sait en état de guerre ? C’est comme ces gens qui s’imposent des contraintes délirantes sous prétexte d’avoir à penser à leur dieu à chaque minute. S’ils étaient vraiment croyants, ils n’auraient pas besoin d’un memento Dei.
    Ne dites pas de mal de l’évasion : c’est à peu près tout ce qui reste dans l’universel désastre.

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    • « Quiconque fait quelque chose, a contre lui ceux qui voudraient faire la même chose, ceux qui font précisément le contraire, et surtout la grande armée des gens d’autant plus sévères qu’ils ne font rien du tout. »
      Continuez à ne rien faire et à prendre votre opium, mais, si c’est possible, sans casser les noix.
      Merci.

      (D’autant qu’outre les références brisées sur le lino, les rappels font tout quand la guerre est interne puisque précisément l’arme de l’Ennemi est l’oubli, d’où la nécessaire vigilance. Si vous étiez pratiquant de la Prière du Coeur, continuelle, pour tenir de tels propos sur « les croyants », on pourrait vous écouter et prendre de la graine, mais votre dernière phrase l’interdit.)

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