Venant de présenter un de mes tarots favoris dans le cadre de mon approche symbolique et esthétique, voici ma plus grande déception à ce jour selon ces mêmes critères. Le tarot « XIII », illustré par les œuvres de Nekro, est à mes yeux une vaste farce imprimée, mais il pourra peut-être intéresser les amateurs de l’artiste espagnol, ou encore les diseurs de bonne aventure qui ne se préoccuperaient guère de symboles et d’archétypes.
Quand j’ai vu que Nekro avait illustré un tarot, j’attendais quelque chose de grand et terrible à l’image de ses compositions, la simplicité bon marché du paquet aurait dû m’alerter. Non, il ne s’agit pas d’un travail d’illustration autour du tarot, donc d’un long projet réfléchi, qui aurait été l’objet d’une commande et d’un projet éditorial, ce qui en général, mais pas toujours, d’où les surprises, s’accompagne d’un livre conséquent, d’un coffret etc… Il s’agit simplement de piocher parmi les œuvres de Nekro et les coller avec plus ou moins (plutôt moins) de sens sur les arcanes majeures et cours du tarot.
Le résultat est absurde et qui plus est, pas si esthétique que ça, bâclé, difficilement lisible. Pourquoi les bâtons sont-ils des corbeaux, pourquoi les deniers sont-ils des clefs ? Tout cela semble aussi gratuit que la représentations d’archétypes masculins par des femmes en dehors de tout discours construit à ce propos. Les coupes sont des sabliers, on peut davantage comprendre le rapprochement dans les formes, l’écoulement et l’usage du sable dans le monde arabe, mais était-ce bien utile, et surtout cela évoque-t-il l’épanchement, le ruissellement affectif, l’humide fécondité, le miroir magique des eaux ? DU TOUT !
Quant aux arcanes et figures, je vous laisse juger de l’inanité des choix :
Mon propos n’est évidemment pas un éloge de la fidèle copie du RWS ou du Marseille, on peut ré-interpréter, ré-inventer à l’envi, mais au moins conserver le support de signification, la symbolique première. Une édition de tarot, par exemple, fait du « Soleil » la déesse japonaise Amaterasu : sur la carte, le soleil levant occupe le tiers supérieur, la déesse est vêtue de rouge-orangé comme l’étendard du RWS, elle est déesse solaire et protectrice, tout va bien, la symbolique est respectée. Ici, la Tempérance est une femme de profil, au casque imposant et dont le cœur est transpercé d’une épée enflammée : quel rapport avec quoi que ce soit ? Au pilon !
Tout ici est gratuit, inepte, peu lisible, décevant. Je comprends cependant que l’on puisse chercher dans les cartes autre chose que ce que j’y cherche et vous propose donc ce stupidissime tarot n’ayant jamais servi qu’à être dépitée, pour la somme modique de 13 euros (remise en mains propres à Paris).
Finissons tout de même sur une consolation visuelle :